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❖ Hittites
Si elle continue celle de l'Ancien Royaume, la civilisation des XIVe et XIII siècle paraît, cependant, davantage marquée par le caractère du cadre politique : un empire fédératif qui réunit des Etats appartenant à des unités culturelles et linguistiques variées. C'est une civilisation composite, comme peut l'être celle d'un peuple guerrier qui domine des voisins souvent plus évolués que lui et copie les institutions des pays qui sont arrivés avant lui au stade de l'empire (Egypte, Mitanni, Babylonie).
❖ Textes.
Quand les Egyptiens entendirent parler de l'attaque contre Amqa (dans la Baqa'a), ils eurent peur, et comme, de plus, leur seigneur. Piphourouriya, était mort, Dahamounzou, qui était reine de l'Egypte, envoya un messager à mon père (Souppilouliouma Ier); elle lui a écrit ainsi :
« Mon mari est mort. Je n'ai pas de fils. Quant à toi, on dit que tes fils sont nombreux; si tu me donnes un de tes fils, il deviendra mon mari. Je ne prendrai jamais mon serviteur comme époux. J'ai peur. » Quand mon père eut entendu cela, il convoqua les Grands Hatti en conseil (en leur disant) : « Une telle affaire ne s'est pas produite de mon temps. »
Annale de Souppilouliouma
En dehors des sources étrangères, textes provenant de l'Egypte, d'Ougarit, d'Assour ou de la Babylonie, nous connaissons la civilisation hittite essentiellement par les fouilles de la capitale, qui ont livré, entre autres trouvailles, les seules archives connues pour le Hatti. Les dizaines de milliers de tablettes de Hattousa, écrites en cunéiformes, contiennent des annales, des traités et des serments d'alliance, des lettres d'officiers au roi, des lois et des minutes de procès, des cadastres, des rituels. Ces derniers sont rédigés en sept langues (hatti du IIIe millénaire, nésite, louvite, palaïte, hourrite, akkadien, sumérien), vivantes ou mortes, qui sont celles des peuples dont les dieux sont honorés à Hattousa. Les textes officiels sur tablettes n'emploient que le nésite ou l'akkadien; mais, à partir du XVe siècle, les rois hittites utilisent pour leurs inscriptions monumentales et pour leurs sceaux les hiéroglyphes hittites, une écriture syllabique faite de signes figuratifs, qui est apparue au XVIe siècle au Kizzouwatna et qui transcrit un dialecte louvite; aussi les spécialistes en viennent-ils à se demander si le nésite n'était pas dès le XIVe siècle une langue morte remplacée dans l'usage courant par le louvite des « hiéroglyphes ». Qu'il s'agisse de cette dernière écriture, que l'on commence à peine à déchiffrer, ou même des tablettes cunéiformes de Hattousa, où le nésite est constellé d'idéogrammes énigmatiques, la compréhension de ces textes est loin d'être parfaite, et l'on a encore beaucoup de mal à définir l'originalité des éléments de la civilisation hittite. C'est le cas, en particulier, pour la société, surtout connue à travers les deux codes retrouvés et pour l'étude de laquelle on ne possède aucun document privé.
❖ Politique.
La répartition des terres paraît s'effectuer essentiellement d'après le principe du « domaine de fonction » : c'est par ce moyen que le roi rémunère les services des guerriers (charriers et fantassins) et des gens du palais, qui constituent une aristocratie hiérarchisée; ces personnages et aussi les communautés villageoises concèdent à leur tour aux cultivateurs des terres sur lesquelles pèse l'obligation des corvées et des redevances. La société comprend d'autre part des citadins, dont les villes sont administrées par des conseils d'Anciens, et de nombreux esclaves, qui ont la personnalité juridique, mais dépendent d'un maître qui a sur eux le droit de vie et de mort. Enfin, au moins à l'époque impériale (que l'on connaît mieux), toute la population est soumise à l'autorité absolue, encore assez humaine, du roi, qui, à l'exemple du pharaon, se fait appeler « Mon Soleil » depuis le XVe siècle et reçoit après sa mort les honneurs divins.
Le Grand Roi du Hatti domine une foule d'autres rois, au domaine d'importance variée, qui lui sont liés par les termes d'un traité juré par les deux parties : en échange de sa protection, ces rois dépendants renoncent à toute diplomatie personnelle, fournissent un contingent à l'armée du Hatti et viennent chaque année, à Hattousa, porter le tribut et renouveler les serments qui les engagent à l'égard de leur souverain. Comme nous l'avons vu, les spécialistes ne connaissent pas encore très bien la géographie politique de l'Anatolie à l'époque hittite et ne savent pas jusqu'où, dans la direction de l'ouest, s'étendait la domination impériale; mais, à coup sûr, elle couvrait une aire disproportionnée à l'étendue et à la population du Hatti, dont les rois avaient dû recourir au système fédéral, qui, seul, leur permettait de maintenir leur autorité aussi loin.
❖ Société.
Faute de bien connaître la société, nous ne savons pas quelle. était l'importance respective des différentes branches de l'économie. Les artisans de l'Empire hittite devaient, comme leurs prédécesseurs en ces lieux, se consacrer en grand nombre à l'extraction et au travail des minerais, mais les textes citent seulement ceux qui, au Kizzouwatna, fabriquaient, à peu près seuls de leur temps, du fer aciéré, un produit précieux dont on tirait des armes, que les rois hittites du xine s. envoyaient en cadeaux aux autres grands souverains. Le Code mentionne des marchands du Hatti circulant dans les divers pays fédérés, mais leur activité devait être limitée, car on constate que l'Empire hittite n'a pratiquement rien reçu des Mycéniens, dont les comptoirs étaient cependant nombreux sur les côtes de l'Anatolie et dont les vases arrivaient alors par milliers à Chypre et dans le domaine syrien de l'Egypte. Sans doute, l'économie de l'Anatolie centrale est-elle, à l'époque hittite, fondée essentiellement sur l'agriculture pratiquée dans les vallées profondes, à l'abri des vents qui balaient le plateau; plus que le commerce, ce sont le butin et le tribut qui sont chargés de faire affluer les richesses dans les différentes villes du Hatti.C'est pour les dieux et pour les souverains que l'art hittite, surtout connu par les trouvailles de Hattousa, a réalisé ses principales oeuvres : les temples et les sanctuaires, les palais et les fortifications ainsi que les reliefs qui les ornent.
Source: Grande Encyclopédie Larousse 1971