Sésostris Ier

Sésostris Ier, deuxième monarque de la XIIe dynastie, l'une des plus glorieuses de l'histoire égyptienne, exerce le pouvoir pendant quarante-cinq ans sur la Haute et la Basse-Égypte. Son règne, qui débute dans le sang par l'assassinat de son père, s'achève dans la sérénité. Sésostris laisse le souvenir d'un pharaon bon et intelligent, d'un fin stratège et d'un grand bâtisseur.


En février de l'an 1962 avant notre ère, quand le jeune Sésostris monte sur le trône, il est déjà rompu à l'exercice du dur métier de roi. Dix ans plus tôt, afin d'éviter tout problème de succession, son père, Amenemhat Ier, l'a en effet associé à l'exercice du pouvoir. Fondateur de la XIIe dynastie, Amenemhat inaugure ainsi un système de transmission du pouvoir qui sera repris par nombre de ses successeurs et aura cours jusqu'aux Ramessides, sous le Nouvel Empire. L'idée d'Amenemhat est de confier au dauphin le rôle de bras armé du pharaon en lui déléguant le commandement des armées égyptiennes. Le futur monarque peut ainsi découvrir le territoire du royaume et se faire connaître des peuples habitant les marches de l'Égypte.
Sésostris prend très à coeur sa nouvelle tâche et, avant même de régner, se fait connaître de son peuple par ses nombreux succès militaires.

Sésostris « dompte les pays étrangers »

Cinq ans avant de monter sur le trône, le prince remporte une victoire décisive sur les Bédouins du désert, victoire qui assure à l'Égypte le contrôle des mines de turquoise du Sinaï. En Nubie, Sésostris mène plusieurs expéditions et remonte le Nil jusqu'à la deuxième cataracte, à proximité de l'actuelle frontière entre l'Égypte et le Soudan. C'est alors qu'il se trouve en campagne contre les Libyens que son père, Amenemhat Ier, est assassiné, victime d'une conspiration de palais.
Aussitôt prévenu - la nouvelle lui parvient en pleine nuit -, il part sans prévenir son armée et regagne Licht, la nouvelle capitale du royaume, fondée trente ans plus tôt par Amenemhat Ier. Alors que la révolte couve, Sésostris, dorénavant premier du nom, parvient, non sans difficultés, à monter sur le trône et, dans le respect de la tradition héliopolitainne, adopte comme nom de couronnement celui de Kheper-Ka-Rê, « Rê fait se manifester le ka ”. Son accession au trône évite à l'Égypte de sombrer dans la guerre civile et rétablit la légitimité de la XIIe dynastie.

Sésostris Ier

Cette passation de pouvoir trouble et difficile est à l'origine de deux grandes oeuvres de la littérature populaire, qui, au Nouvel Empire, deviendront des classiques scolaires pour les écoliers égyptiens. Le premier, le conte de Sinouhé, se présente sous la forme d'un récit narrant les tribulations d'un fonctionnaire du palais qui, craignant d'être accusé d'avoir participé au complot visant Amenemhat Ier, s'enfuit en Syrie où il devient, après plusieurs années, chef de tribu. Miné par le remords, il revient près de Sésostris qui, dans sa grande bonté, lui pardonne et le reprend à son service. La seconde oeuvre, l'Enseignement d'Amenemhat Ier, est un recueil de préceptes adressés au jeune Sésostris, présenté comme un élève paré de toutes les qualités. Ces deux ouvrages sont en quelque sorte des oeuvres de « propagande » chargées de mettre en valeur le nouveau pharaon.
Dès qu'il prend le pouvoir et pendant les quarante-cinq ans qu'il va rester sur le trône, Sésostris 1er va se montrer un grand bâtisseur. A tel point qu'on a retrouvé des monuments datant de son règne dans pas moins de trente-six sites différents, leur répartition géographique correspondant aux emplacements stratégiques de la basse et de la haute vallée du Nil.
Dans le Nord, il fait construire le temple de Rê-Atoum à Héliopolis, vers 1959 avant notre ère; trente ans plus tard, il y fait ajouter une paire d'obélisques. Il est aussi l'un des premiers pharaons à s'intéresser à la région du Fayoum, au sud-ouest du Delta, où il fait bâtir plusieurs édifices. Non loin de là, tout près de Licht, se trouve sa propre pyramide, copie conforme de celle de son père, mais de dimensions plus imposantes. Ces deux monuments, distants d'un kilomètre et demi, sont aujourd'hui très endommagés et ne forment plus que des monticules d'environ 20 m de hauteur !
Sésostris 1er fait également bâtir de nombreux édifices dans la région de Thèbes, l'ancienne capitale, dont son père est originaire. Il participe activement à l'agrandissement du grand temple d'Amon-Rê à Karnak. Le pharaon est aussi à l'origine de nombreux ouvrages militaires, qui viennent renforcer les frontières du pays. S'étendant sur 13 000 m2, la forteresse de Bouhen reste à cet égard le plus remarquable.

Politique d'expansion

Car, Sésostris, outre ses talents de bâtisseur, sait se montrer un grand chef de guerre. Fort des dix ans passés à la tête de l'armée de Pharaon, il va poursuivre l'oeuvre de politique extérieure inaugurée par son père. Au sud, il achève la conquête de la Basse-Nubie en étendant son contrôle jusqu'à la troisième cataracte, sur le territoire de l'actuel Soudan. A l'ouest, il prend le contrôle de plusieurs oasis du désert libyque, tandis qu'à l'est il maintient fermement les frontières déjà existantes afin d'exploiter les mines d'or situées à l'est de Coptos et les carrières de pierre qui serviront, sous son règne, à la construction de soixante sphinx et de plus de cent-cinquante statues !
Plus tard, Sésostris Ier favorise le développement des relations commerciales avec le Moyen-Orient, en particulier avec la Syrie et la Palestine, comme en témoignent les nombreuses traces de son nom retrouvées par les archéologues. Au cours des deux dernières années de son règne, il associe son fils, le futur Amenemhat II, à son propre pouvoir afin de perpétuer les préceptes de son père. Sésostris Ier meurt, probablement de sa belle mort, en 1917 avant notre ère.