Le Grenier de Clio : Littérature grecque.

Télémaque

14) Télémaque, persuadé par divers songes que son père Ulysse n'est plus sur la terre, exécute le dessein, qu'il avait conçu depuis longtemps, de l'aller chercher dans les enfers.

Télémaque
Télémaque part des Champs Elisées,
où il a reconnu son grand-père Acrise.

Il se dérobe du camp pendant la nuit, et se rend à la fameuse caverne d'Achérontia. Il s'y enfonce courageusement et arrive bientôt au bord du Styx, où Charon le reçoit dans sa barque. Il va se présenter devant Pluton, qui lui permet de chercher son père dans les enfers. Il traverse d'abord le Tartare, où il voit les tourments que souffrent les ingrats, les parjures, les impies, les hypocrites, et surtout les mauvais rois. Il entre ensuite dans les Champs Elysées, où il contemple avec délices la félicité dont jouissent les hommes justes, et surtout les bons rois, qui, pendant leur vie, ont sagement gouverné les hommes. Il est reconnu par Arcésius, son bisaïeul, qui l'assure qu'Ulysse est vivant et qu'il reprendra bientôt l'autorité dans Ithaque, où son fils doit régner après lui. Arcésius donne à Télémaque les plus sages instructions sur l'art de régner.

Il lui fait remarquer combien la récompense des bons rois, qui ont principalement excellé par la justice et par la vertu, surpasse la gloire de ceux qui ont excellé par la valeur. Après cet entretien, Télémaque sort du ténébreux empire de Pluton et retourne promptement au camp des alliés.

Télémaque
Diomède se présente en supliant,
devant l'assemblée des princes alliés.

15) Télémaque, dans une assemblée des chefs de l'armée, combat la fausse politique qui leur inspirait le dessein de surprendre Venuse, que les deux partis étaient convenus de laisser en dépôt entre les mains des Lucaniens. Il ne montre pas moins de sagesse à l'occasion de deux transfuges, dont l'un, nommé Acanthe, était chargé par Adraste de l'empoisonner; l'autre, nommé Dioscore, offrait aux alliés la tête d'Adraste. Dans le combat qui s'engage ensuite, Télémaque excite l'admiration universelle par sa valeur et sa prudence: il porte de tous côtés la mort sur son passage, en cherchant Adraste dans la mêlée. Adraste, de son côté, le cherche avec empressement, environné de l'élite de ses troupes, qui fait un horrible carnage des alliés et de leurs plus vaillants capitaines. A cette vue, Télémaque, indigné, s'élance contre Adraste, qu'il terrasse bientôt et qu'il réduit à lui demander la vie. Télémaque l'épargne généreusement; mais comme Adraste, à peine relevé, cherchait à le surprendre de nouveau, Télémaque le perce de son glaive. Alors les Dauniens tendent les mains aux alliés en signe de réconciliation et demandent, comme l'unique condition de paix, qu'on leur permette de choisir un roi de leur nation.

16) Les chefs de l'armée s'assemblent pour délibérer sur la demande des Dauniens. Télémaque, après avoir rendu les derniers devoirs à Pisistrate, fils de Nestor, se rend à l'assemblée, où la plupart sont d'avis de partager entre eux le pays des Dauniens, et offrent à Télémaque, pour sa part, la fertile contrée d'Arpine. Bien loin d'accepter cette offre, Télémaque fait voir que l'intérêt commun des alliés est de laisser aux Dauniens leurs terres et de leur donner pour roi Polydamas, fameux capitaine de leur nation, non moins estimé pour sa sagesse que pour sa valeur. Les alliés consentent à ce choix, qui comble de.joie les Dauniens.

Télémaque
Télémaque présente à Antiope,
la hure du sanglier.

Télémaque persuade ensuite à ceux-ci de donner la contrée d'Arpine à Diomède, roi d'Etolie, qui était alors poursuivi avec ses compagnons par la colère de Vénus, qu'il avait blessée au siège de Troie. Les troubles étant ainsi terminés, tous les princes ne soigent plus qu'à se séparer pour s'en retourner chacun dans son pays.

17) Télémaque, de retour à Salente, admire l'état florissant de la campagne; mais il est choqué de ne plus retrouver dans la ville la magnificence qui éclatait partout avant son départ. Mentor lui donne les raisons de ce changement: il lui montre en quoi consistent les solides richesses d'un Etat et lui expose les maximes fondamentales de l'art de gouverner.
Télémaque ouvre son cœur à Mentor sur son inclination pour Antiope, fille d'Idoménée. Mentor loue avec lui les bonnes qualités de cette princesse, l'assure que les dieux la lui destinent pour épouse, mais que maintenant il ne doit songer qu'à partir pour Ithaque. Idoménée, craignant le départ de ses hôtes, parle à Mentor de plusieurs affaires embarrassantes qu'il avait à terminer, et pour lesquelles il avait encore besoin de son secours. Mentor lui trace la conduite qu'il doit suivre et persiste à vouloir s'embarquer au plus tôt avec Télémaque.
Idoménée essaie encore de les retenir en excitant la passion de ce dernier pour Antiope. Il les engage dans une partie de chasse dont il veut donner le plaisir à sa fille. Elle y eût été déchirée par un sanglier, sans l'adresse et la promptitude de Télémaque, qui perça de son dard l'animal. Idoménée, ne pouvant plus retenir ses hôtes, tombe dans une tristesse mortelle. Mentor le console, et obtient enfin son consentement pour partir. Aussitôt on se quitte avec les plus vives démonstrations d'estime et d'amitié.