Déesses dangereuses.

Certaines déesses qui incarnent la toute-puissance solaire comme Sekhmet, Hathor, Tefnout, ou Bastet au caractère redoutable contrebalancé par un caractère plus doux ont reçu le nom de "Déesses Dangereuses". Ces aspects qui semblent contradictoires, expriment en fait les diverses fonctions et les différents aspects des déesses félines.

Sekhmet tenant le sceptre Ouadj
© Musée de Turin

Ces déesses ont une double nature.
• Sous leur forme redoutable, elles véhiculent les forces issues du soleil : brûlantes, aveuglantes, destructrices. Leur aspect agressif est dicté par leur lutte permanente contre les forces et les puissances du chaos.
• Sous leur forme pacifique, des rites sont destinés non pas à les apaiser, car le soleil doit garder sa toute puissance et garantir la continuité de l'existence, mais à les rendre favorables, à éveiller l'aspect bénéfique qu'elles portent en elles et qui rappelle leur rôle fondamental dans la permanence de la création.

Toutes ces filles de se manifestent en tant qu'œil de l'astre solaire dont elles incarnent le rayonnement. Pour repousser les ténèbres et répandre la lumière sur terre, il leur faut s'éloigner de leur père. Paradoxalement, elles doivent rester aux côtés de l'astre afin de le nourrir et de le régénérer. Cette ambivalence a été résolue par la création de mythes justifiant les allées et venues des filles du soleil. Sous leur forme redoutable, ces filles de Rê véhiculent les forces issues du soleil, brûlantes, aveuglantes et destructrices pour quiconque vit dans le pays. Lorsque, à la fin de l'année égyptienne (vers le mois de juillet), le pays n'est pas encore vivifié par le retour de l'inondation, le rayonnement solaires devient alors un danger et une préoccupation pour tous les habitants de l'Égypte dont les terres se dessèchent peu à peu. C'est durant cette période critique que ces déesses sont le plus à craindre, leur ardeur belliqueuse s'ajoute aux miasmes nocifs montant des eaux croupissantes et des berges boueuses et au sol craquelé impropre à toute culture.

La venue des eaux salvatrices évoque la dualité reconstituée du principe féminin, qui génère la vie tout en la défendant. L'observation du monde animal suggéra sans doute le modèle de ces entités à deux facettes, les femelles qui viennent de mettre bas devenant en général les féroces gardiennes de leur progéniture. Il n'est donc pas exclu que le mythe de la Déesse Dangereuse ait une connotation sexuelle. L'agressivité de l'entité, liée à la défense des petits, s'atténue lorsqu'elle est de nouveau disponible pour l'accouplement. (Texte Isabelle Franco)

❖ Iconographie

Sekhmet
© Musée de Turin
Bastet
Oeuvre moderne
Tefnout
Temple de Kom Ombo