Le Grenier de Clio : Légendes bibliques.

Abel & Caïn

Le quatrième chapitre de la Génèse rapporte l’histoire d’Abel et Caïn, fils d'Adam et d'Eve.

Cain tuant Abel
Cain tuant Abel
CHAGALL

Caïn était cultivateur et Abel pasteur de petit bétail. Un jour les frères vinrent faire des offrandes à Yahvé. Caïn offrit les produits du sol et Abel offrit les premiers nés de son troupeau et leur graisse. Seule l'offrande d'Abel fut agréée. Alors Caïn, le cultivateur, tua son frère Abel, le pasteur.

On retrouve déjà cette rivalité agriculteur / pasteur dans les mythes sumériens qui mettent en conflit Lahar et Ashnan.

Après ce meurtre, le premier de l’humanité, Caïn fait face et à la malédiction divine. Il s’exile au pays de Nod, à l’est d’Eden où il rencontre une femme (sortie d'on ne sait où) et engendre Hénoch. Père de la civilisation, Caïn bâtit une cité à laquelle il donne le nom de son fils.

❖ Texte biblique.

Cain tuant Abel
Cain tuant Abel de Sebastiano RICCI

1 L'homme s'unit à Ève, sa femme ; elle devint enceinte et donna naissance à Caïn. Elle dit :- Avec l'aide de l'Éternel, j'ai formé un homme.
2 Elle mit encore au monde le frère de Caïn, Abel. Abel devint berger et Caïn cultivateur.

3 Au bout d'un certain temps, Caïn présenta des produits de la terre en offrande à l'Éternel.
4 Abel, de son côté, présenta les premiers-nés de son troupeau et en offrit les meilleurs morceaux. L'Éternel porta un regard favorable sur Abel et sur son offrande ;
5 mais pas sur Caïn et son offrande. Caïn se mit dans une grande colère, et son visage s'assombrit.
6 L'Éternel dit à Caïn :- Pourquoi te mets-tu en colère et pourquoi ton visage est-il sombre ?
7 Si tu agis bien, tu le relèveras. Mais si tu n'agis pas bien, le péché est tapi à ta porte : son désir se porte vers toi, mais toi, maîtrise-le !
8 Mais Caïn dit à son frère Abel :- Allons aux champs. Et lorsqu'ils furent dans les champs, Caïn se jeta sur son frère Abel et le tua.
9 Alors l'Éternel demanda à Caïn :- Où est ton frère Abel ?- Je n'en sais rien, répondit-il. Suis-je le gardien de mon frère ?
10 Et Dieu lui dit :- Qu'as-tu fait ? J'entends le sang de ton frère crier vengeance depuis la terre jusqu'à moi.
11 Maintenant, tu es maudit et chassé loin du sol qui a bu le sang de ton frère versé par ta main.
12 Lorsque tu cultiveras le sol, il te refusera désormais ses produits, tu seras errant et fugitif sur la terre.
13 Caïn dit à l'Éternel : - Mon châtiment est trop lourd à porter.
14 Voici que tu me chasses aujourd'hui loin du sol fertile, et je devrai me cacher devant toi, je serai errant et fugitif sur la terre et si quelqu'un me trouve, il me tuera.
15 L'Éternel lui dit :- Eh bien ! Si on tue Caïn, Caïn sera vengé sept fois. Et l'Éternel marqua Caïn d'un signe pour qu'il ne soit pas tué par qui le rencontrerait.
16 Caïn partit loin de l'Éternel : il alla séjourner au pays de Nod, le Pays de l'Errance, à l'orient d'Éden, le Pays des délices.

(version : Bible du semeur, Gen.4)

❖ Caïn le maudit.

Cain par Fernard CORMON © Musée d'Orsay

Adam et Eve eurent plusieurs fils dont l'ainé fut Caïn et le puiné Les frères avaient auparavant fait des offrandes à Dieu, lequel avait agréé celle du second, tandis qu’Il avait refusé celle de son frère. Le récit, cependant, ne donne aucune explication claire de ce choix divin.

Même mystère autour du fameux signe que la divinité appose sur Caïn, après le meurtre qui en fait lequel avait agréé celle du second, tandis qu’il avait refusé celle de son frère. Cain le cultivateur, tua son frère Abel, le pasteur. Le récit, cependant, ne donne aucune explication claire de ce choix divin. Même mystère autour du fameux signe que la divinité appose sur Caïn, après le meurtre.

❖ Autre version.

Mx

Toutefois il existe une autre explication fournie par Eutychius, patriarche d'Alexandrie dans ses Annales.

Cain tuant Abel
Cain tuant Abel avec un machoire d'âne.

Eve enfanta, en même temps que Caïn, une fille nommée Azrun et en même temps qu'Abel une autre fille nommée Owain ; lorsque le temps de marier les deux fils fut venu, Adam destina Owain à Caïn, et Azrun à Abel. Mais Abel préférait sa soeur jumelle Owain qu'il trouvait plus belle. Adam leur dit d'allait faire leur oblation et celui dont le sacrifice serait accepté pourrait choisir l'épouse qu'il souhaitait. Satan inspira secrètement à Caïn de se défaire d'Abel, pour l'amour d'Azrun : ce qui , empêchant que son offrande ne fût agréable à l'Eternel, augmenta le dépit de Caïn contre son frère ; de sorte qu'ils ne furent pas plus tôt descendus de la montagne, qu'il attaqua son frère. Abel se serait défendu courageusement, et il eut d'abord l'avantage : il jeta Caïn par terre, mais Caïn se releva, et le tua. L'arme utilisée fut une simple pierre mais certains disent que Caïn déchira son frère à belles dents. D'autres, qu'il l'assomma avec une mâchoire d'âne : les peintres usent de cette supposition. D'autres veulent qu'il se soit servi d'une fourche. Saint Chrysostome lui met en main une épée; saint Irénée lui donne une faux et Prudence lui donne une sorte de serpe.
La belle Azrun, que Caïn épousa après ce coup, et qu'il emmena avec lui dans son exil, fut donc la cause, innocente sans doute, du crime de Caïn.
Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle

❖ Textes.

- Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques, 1616

Race d’Abel, dors, bois et mange ;
Dieu te sourit complaisamment.
Race de Caïn, dans la fange
Rampe et meurs misérablement.
Race d’Abel, ton sacrifice
Flatte le nez du Séraphin !
Race de Caïn, ton supplice
Aura-t-il jamais une fin ?
...
- Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857

 

... Quand le plus haut des pics eut bavé son écume,
Thogorma, fils d’Élam, d’épouvante blêmi,
Vit Qaïn le Vengeur, l’immortel Ennemi
D’Iahvèh, qui marchait, sinistre, dans la brume,
Vers l’Arche monstrueuse apparue à demi.
- Leconte de Lisle, Qaïn

 

Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatiguée et ses fils hors d'haleine
Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l'ombre fixement...
   Victor HUGO, La Légende des Siècles, 1877